Difficile de dire ce que je ressens depuis ce mois d’avril 2019 où j’ai emménagé dans un petit faré à Moorea. Tellement de sensations, de ressentis. Un grand émerveillement tout d’abord. La découverte d’une île magnifique et la splendeur de cette nature si généreuse. Je connecte l’abondance avec notre Mère Terre. La douceur, la paix, la patience, la gentillesse de ses habitants. Ma vie se déroule calmement en compagnie de ma chienne Mikki qui m’apprend beaucoup. Nous vivons toutes deux chaque jour tel qu’il se présente.

Vivre dans les énergies de l’hémisphère sud, énergies féminines, apporte sans aucun doute de nouvelles évolutions. Le premier bienfait m’est donné par le soleil pour recharger mon corps fatigué et lui redonner un souffle. Un nouveau cycle de vie commence.

Entrer dans l’univers polynésien est fascinant. L’héritage Ma’ohi et ses légendes où se côtoient dieux et hommes rythment à nouveau la vie des Polynésiens, après des siècles d’interdits. Reconnaissants envers les richesses que la nature leur offre, ils célèbrent, chaque année autour du vingt novembre, comme leurs ancêtres, la fête des Pléiades –Matari’i i ni’a – qui annonce le retour de l’abondance – Te Auhune – et le retour des ancêtres. L’apparition ou la disparition de la constellation des Pléiades, au lever et au coucher du soleil, divise l’année en deux parties : Matari’i i nia « les Pléiades dessus », saison des pluies et Matarii i raro, saison sèche à partir du 20 mai, « les Pléiades dessous ». Les étoiles marquent le temps polynésien. Ces rituels permettent d’entrer en communion avec les forces naturelles et spirituelles de l’univers. De nombreuses cultures établissent toujours une relation profonde entre les Pléiades – les Sept Sœurs – et l’origine de l’humanité. Hawaïens, Aborigènes, Mayas ou Incas relatent avec la même similitude le mythe de la Création des Sept Sœurs ayant ensemencé la planète, faisant d’elles les sept mères originelles de la Terre.

Moorea, l’île sœur de Tahiti, est la partie émergée du volcan Tohi’e’a dont plus de deux mille mètres sont sous l’océan. Son nom signifie Lézard (Mo’o) Jaune (Rea). Selon la légende, un couple vivant sur l’île de Maiao mit au monde un œuf. Le mari le prit et le déposa dans une grotte. A son éclosion, un lézard jaune apparut. Le couple l’appela Moorea et l’éleva jusqu’à ce qu’il soit grand. Devenu immense, ses parents prirent peur et décidèrent de l’abandonner, fuyant sur une pirogue. Ne voyant plus revenir ses parents, Moorea se dit qu’ils l’avaient abandonné et plongea dans l’océan et nagea vers le levant. Il rencontra trois forts courants et se noya dans le troisième. Son corps dériva et s’échoua sur les rivages d’Aimeho, ancien nom de l’île. Deux pêcheurs trouvèrent son corps et avertir la population de leur trouvaille en criant « Mo’o rea ! Un lézard jaune ! » 

 Pelé, déesse du feu et des volcans

Le volcan, lié à la déesse Pélé, Pele-honua-mea « Pélé de la Terre Sacrée », est un lieu sacré dans la mythologie polynésienne. Père – « rougeoiement du feu » – est née dans la vallée de Papeno’o à Tahiti. En raison de conflits permanents, elle est chassée par sa sœur Namaka, déesse de l’eau et se réfugie à Hawaï où elle prend le nom de Pélé. Dans la vallée de Papeno’o, au moment de son départ, la reine de la vallée laisse une grande pierre projetée du volcan et confie à une chenille magique son feu pour protéger sa vallée. La chenille se dessine sur le flanc d’une des montagnes entourant la vallée. Une autre montagne représente les cheveux – Rouru o père – de la déesse. La couleur de la terre ocre rouge est le signe de la présence de la déesse du feu. Une cérémonie de recueillement sur la pierre – Te Opuri a Père –  a lieu chaque année sur laquelle sont déposées des offrandes.

Tout est présent sur cette terre chaleureuse pour renouer avec les dimensions sacrées de la féminité. L’accueil y est amical et souriant. Que ce soit dans les boutiques, les restaurants ou ailleurs, je suis accueillie avec des « ma chérie » qui réchauffent le cœur de la petite fille intérieure. Le tutoiement est de rigueur pour tous et rapproche d’emblée.

La beauté s’y dévoile sous différentes expressions. La beauté des femmes, des danses, des chants et de la musique au son du tambour –Te Pahu– et Ukulélé ainsi que celle des paysages époustouflants, transportent dans un autre univers. Mon âme savoure cette splendeur. La nature abondante y est encore préservée. Les femmes, belles dans leur féminité, se parent de fleurs ou couronnes sur la tête et colliers de perles ou coquillages. Les hommes aussi portent couronnes de fleurs et colliers. Les tatouages ​​sont également signes de beauté et racontent l’histoire personnelle de chacun. Ils symbolisent le lien entre le Ciel et la Terre. Cette beauté venant du « mana » – énergie sacrée du Ciel – transperce de sa force.

Le Sacré se perçoit dans tous les éléments, arbres, pierres et montagnes et ses « marae », lieux de culte en plein air. Monuments consacrés au Dieu et à la Déesse, les marae sont protégés par le « tapu », interdit absolu et sacré, dont la transgression attire la malédiction. Considérés comme des espaces qui réveillaient la conscience, ils étaient le point de rencontre entre le monde visible et invisible. Construits en pierre, sans ciment, chaque pierre avait un caractère sacré.

Les Polynésiens communiquent les expressions sacrées de leur culture ancestrale par les chants, la musique et la danse. Avec le « ’Ori Tahiti » – danse tahitienne – ils célèbrent leur union avec le « Fenua », la terre originelle et ses éléments. Frappant leurs pieds au sol, ils font monter en eux la kundalini de la Terre. Leurs mains racontent une histoire, souvent liée à la mer, invitant le « Mana », le Souffle de Vie, à jaillir de la mer, à descendre des montagnes et à rayonner dans chaque âme.

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